La conduite du changement : élément clé pour impacter les usages

 

Noémie Simand, chargée de projet en usage du bâtiment chez le Cerema est intervenue dans le webinaire CUBE ETAT du 16 janvier 2024, sur le thème de l’accompagnement au changement dans le cadre du concours. 

 

Pourquoi n’est-on pas toujours “écologique” au travail ?  

Noémie a posé cette question ouverte à l’attention des cubistes lors du début de son intervention, voici les éléments de réponses qu’elle a fourni.  

La charge mentale, le fait d’être concentré sur son travail en faisant abstraction de son environnement, on ne s’en rend plus vraiment compte.
Des habitudes s’installent, ce sont des mécanismes que le cerveau met en place pour alléger cette charge mentale.  

Par exemple : allumer son ordinateur le matin en arrivant au bureau, puis aller chercher un café le temps du démarrage est une habitude.  

La mise en place de nouvelles habitudes demande un effort, c’est pour cela qu’il faut accompagner les personnes dans cette démarche.  Il faut identifier le problème, le frein pour en déduire le levier à mettre en place.  

L’énergie n’est pas un élément visible, ce n’est pas quelque chose de matérialisé et de palpable, nous pouvons avoir du mal à l’évaluer.
Pour la rendre visible, il est possible d’utiliser différents nudges : sur les interrupteurs de luminaires et autour des chauffages par exemple.
Il est aussi possible de développer la culture de l’énergie, de sensibiliser sur “qu’est-ce qu’un kilowattheure”.  

Le manque d’information et la complexité des systèmes : pour les techniciens il paraît évident de tourner le thermostat dans un sens donné pour le régler correctement.
En revanche, pour les occupants qui s’occupent en premier lieu de leur travail, avec une charge mentale importante, ce n’est pas forcément évident.
Il peut donc être pertinent de mettre au point des petits guide de fonctionnement ou bien de passer dans les bureaux pour effectuer des petits rappels sur la mise en marche et le bon réglage des équipements.  

Les occupants ne s’approprient pas les lieux, ils “ne font pas comme chez eux”, “ils ne paient pas la facture”.
Pour pallier ce type de frein, il faut réfléchir à la façon dont les agents peuvent s’approprier leurs locaux et bâtiments et se responsabiliser davantage.  

La question de l’inconfort peut être un frein majeur dans la résistance au changement, nous allons voir comment ces freins peuvent être abordés.  

 

Suffit-il d’informer pour susciter le changement ?  

 

Le fait d’être informé nous engage-t ‘il toujours dans le changement ?  

En effet, le plus souvent lorsqu’une démarche d’économies d’énergie est mise en place, c’est un fonctionnement descendant avec un plan d’actions.
Des éléments d’information sont envoyés vers les agents : “il faut que vous éteigniez bien votre ordinateur”, etc.
Ce qui est observé c’est que le fait d’informer ne garantit pas forcément le changement en retour.  

En effet, l’être humain est assez peu rationnel, il existe de nombreux biais cognitifs (raccourci cognitif qui nous permet de prendre une décision plus rapidement alors que notre environnement nous renvoie beaucoup d’infos). 

Noémie en cite 3 principaux :  

  • Le biais de normalité : les choses fonctionneront à l’avenir comme elles ont fonctionné dans le passé.  
  • Le biais du status quo : la nouveauté apporte plus de risques que d’avantages possibles, cela entraîne une résistance au changement qui est assez naturelle mais que l’on peut dépasser.  
  • Le biais de conformité : une définition, une habitude ou une obligation de la société civile représente une vérité.  

Il faut du temps pour intégrer un changement. Il y a un temps individuel, car le changement s’effectue en différentes étapes :  

La première est la “pré contemplation” : nous sommes dans le déni ou non informé, le besoin de changer n’est donc pas ressenti.
Différentes étapes nous amènent au passage à l’action et vers le maintien de l’habitude prise.  

Il est impossible d’accompagner chaque agent de chaque bâtiment, mais l’idée est d’apporter des actions compatibles à chaque étape.
Si on n’est pas informés, on peut apporter de l’information.
Exemple : la fresque du climat qui permet de comprendre concrètement les impacts du changement climatique.


La prise de conscience permet de stimuler la volonté de passer à l’action, il y a donc là un besoin de mode d’emploi, de démonstration, par exemple sur comment régler le thermostat d’un chauffage ou d’une liste d’actions pour savoir quoi faire et comment.  

Il y a un temps de diffusion de groupe en groupe via des “leaders d’opinion” (qui ont un impact sur les autres), ce changement se diffuse bien et peut devenir une nouvelle norme sociale si les bonnes personnes sont impliquées. 

 

Titre : Comment susciter le changement de manière concrète ?  

 

En agissant sur les 2 types de motivation. 

La motivation externe, qui est contrainte et forcée sur un modèle de “carotte et bâton”.
La motivation interne que l’on se créé en nous même, par exemple quelqu’un qui se lève tôt et qui va faire un footing dans le froid.  

C’est donc cette dernière forme de motivation qu’il faut tenter de toucher, la motivation se nourrit de 3 éléments :  

  • D’un besoin d’autonomie : il faut laisser l’initiative aux personnes, en évitant les démarches descendantes et en leur laissant le maximum de liberté ; 
  • D’un sentiment de compétence : il faut former les agents à l’utilisation de leurs équipements, à la connaissance de l’énergie ; 
  • D’un besoin d’appartenance sociale : faire équipe, participer dans une activité conviviale afin de pouvoir changer la norme de son établissement.
     

Les exemples d’actions concrètes :  

La mise en place d’une équipe relais au sein de son bâtiment : ce sont des gens volontaires et motivés, donc ils font potentiellement parties des “leaders d’opinion” qui permettent de diffuser le changement.  

Faire un diagnostic participatif en intégrant les occupants qui pourront mieux s’approprier leurs locaux. Le fait de visiter la chaufferie par exemple, peut leur faire découvrir leur bâtiment sous un angle nouveau.  

Organiser un brainstorming pour récolter des idées, cela permet également de s’appuyer sur les constats et sur les positions d’actions que font les agents.

Organiser un atelier autour de la notion de watt, kilowattheure, sur les notions de puissance en fonction des équipements utilisés.
Par exemple : classer les appareils de façon croissante selon la quantité d’énergie qu’ils utilisent.
De plus un jeu “éco-conso” est mis à disposition pour les cubistes sur la plateforme Expertises.Territoires 

Une communication positive, en montrant que les efforts paient, en évitant la culpabilisation. 

Noémie a abordé 3 freins au changement qu’il est souhaitable d’éviter.  

  1. L’iniquité : il faut que tout le monde réalise des efforts égaux, même la hiérarchie qui doit montrer l’exemple ;  
  2. L’incohérence : il faut que la démarche ait du sens, qu’elle soit “sincère”, sinon elle risquerait d’être qualifiée de “greenwashing” ;  
  3. L’inconfort : le respect des consignes de chauffe et de climatisation en périodes hivernales et estivales au minimum.
    En hiver le ressenti doit bien être 19°C. Il faut donc rester en veille auprès des agents pour identifier leurs éventuels problèmes d’inconfort afin de pouvoir y remédier et les accompagner. 
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